Berlinale (en ligne) — Jour 5
par Xavier Leherpeur
Suite et fin des aventures berlinoises qui nous auront offert quelques beaux moments de plaisirs comme pas mal d’agacements. Et dont le palmarès, porté par la prime au sujet, nous laisse grandement sur notre faim.
Même s’il figure au palmarès (prix de la contribution artistique) nous ne nous attarderons guère sur le film mexicain Una película de policías (A Cop Movie) d’Alonso Ruizpalacios. Entre vraie fausse fiction, gimmicks mille fois vus de vrai aux cinéma vérité (les comédiens d’adressent à la caméra) et vrai faux making of du tournage où nous découvrons que les deux flics dont nous suivons le parcours sont en réalité des acteurs, l’écriture et la mise en scène passent leur temps à accumuler des mises en abyme et des effets de style s’avèrant de moins en moins pertinents sur la durée. Le tout pour évoquer au final la violence urbaine et dénoncer la corruption policière au Mexique. Beaucoup de bruit pour pas grand-chose.
Documentaire de plus de trois heures trente, Herr Bachmann und seine Klasse (Mr Bachmann and His Class) de Maria Speth nous immerge dans la classe d’un professeur de musique et de littérature. Des arts donc pas essentiels pour notre cher gouvernement, mais qui le sont grandement quand il s’agit de transmettre à des élèves d’une dizaine d’années, issus de l’immigration et venus de pays souvent en guerre, l’art et la manière de devenir des adultes dans le respect des autres et de leurs différences culturelles. Différences qui deviennent ici des outils pédagogiques, luttant ainsi contre l’idée que « l’intégration » ne peut se faire sur un modèle unique et dominant. Le brassage cultuel et artistique est au cœur palpitant du projet de cet enseignant aux allures de rock star que la cinéaste suit donc dans son quotidien. Un film positif, bel hommage à l’école publique, appuyant parfois un peu trop son message humaniste, mais qui fait indéniablement du bien. Et que le jury a récompensé d’un Ours d’argent plutôt mérité.
Un prix au diapason d’un palmarès qui a plus souvent récompensé la note d’intention plutôt que le geste cinématographique. Hypothèse probable pour expliquer l’ascension jusqu’à l’Ours d’or du film de Radu Jude Babardeală Cu Bucluc Sau Porno Balamuc. Un pamphlet satirique et masqué (tourné en pleine pandémie) dont le thème central (voir Berlinale Jour 2) peut séduire sur le papier mais certainement pas la très balourde exécution. Idem pour le prix de la mise en scène attribué à Dénes Nagy pour Természetes Fény, pesant film formel et sentencieux sur l’enrôlement forcé des militaires hongrois par l’armée nazie à la fin de la seconde guerre mondiale. En revanche le Grand Prix attribué à Ryusuke Hamaguchi pour son Guzen to Sozo (Berlinale Jour 4) rectifie quelque peu la tendance et sacre une écriture et une mise en scène qui pensent cinéma avant sujets à thèse.
Tschüß (au revoir)