To the North de Mihai Mincan

par Maryline Alligier

To the North de Mihai Mincan.

To the North, premier long métrage de fiction du cinéaste roumain Mihai Mincan, puise dans le réel. Inspiré d’un fait divers, To the North affirme pourtant sa singularité, celle d’une tension permanente entre un réalisme suffocant et les archétypes du film noir. Deux garçons ont un seul rêve : rejoindre les Etats-Unis. Trouver un cheval, devenir cow-boy  pour l’un, « faire de l’argent » à New York pour l’autre. Ils n’ont qu’un sac à dos pour tout bien, jouent au foot sur le quai avec une boîte de conserve. Parvenus clandestinement à bord d’un cargo en pleine nuit, bien planqués parmi les conteneurs ils savent qu’ils doivent survivre plusieurs jours avant d’arriver sans connaître vraiment leur destination. L’équipage se compose de marins philippins et taïwanais dont le capitaine, qui ne tolère aucun clandestin. Un marin philippin religieux découvre Dumitru (Nikolai Becker). Ému par le fait que Dumitru, effrayé, tient une Bible dans ses mains, le marin va tenter de sauver la vie du garçon. Dumitru est en danger de mort : clandestin, son sort est d’être jeté par dessus bord. Cette Bible  ne sera pas leur salut mais leur lien. To the North nous plonge au milieu de l’océan dans les entrailles d’un navire, où l’on sent une dynamique redoutable de pouvoir et d’impuissance, au cœur de laquelle la vie de Dimitru est en jeu. Dans cet environnement hostile fait d’acier et de passages étroits, les cadres enferment le personnage. La tension de ce «  survival à suspens » se traduit par une tension formelle : alternance des cadres larges sur l’immensité de la mer ouvrant l’horizon et des cadres serrés sur les visages de Dimitru, alternance entre silence et longs monologues, entre lenteur et vélocité. Huis clos sur un drame humain universel, To the North est « un film sur la peur qu’on ressent quand notre vie est sous le pouvoir de quelqu’un d'autre ». Sa force est de donner à ressentir la séparation entre ceux qui peuvent célébrer leur succès ou la naissance d’un enfant pendant que d’autres se cachent dans l’obscurité, avec leurs rêves comme unique réconfort. 

En salles le 26 février (Distribution : Destiny Films)

THOMAS AIDAN